Banc d'essai 250i V2 / HiFi Choice / 1 août 2023

Avez-vous déjà entendu parler d’un fabricant d'appareils électroniques qui, après avoir été loué pour ses excellents produits haut de gamme, ternit l'éclat de sa réputation avec un modèle entrée de gamme franchement décevant? Je ne pense pas. Car c'est un scénario qui n'arrive pratiquement jamais. Pour les marques qui comptent profiter des marges inhérentes aux produits haut de gamme, les critères de conception et de performance attribués à leur version "abordable" sont calculés avec un soin méticuleux, et ce pour de bonnes raisons.

Les restaurateurs avisés savent à quoi s'en tenir lorsqu'il s'agit du vin servi par la maison. Pour préserver la bonne réputation de l'établissement et assurer la fidélité de la clientèle, il est évident qu'il faut offrir quelque chose de plus qu'une simple valeur respectable et ostentatoire. Un appareil hi-fi d'entrée de gamme proposé par une marque qui a l'ambition de maintenir son catalogue de composants très haut de gamme bien achalandé n'est pas différent. C'est la porte d'entrée, le mécanisme qui permet de fidéliser les utilisateurs et de leur donner envie d'acheter des produits au prix et aux spécifications plus sophistiqués.

Avec la version V2 de son amplificateur intégré « entrée de gamme » entièrement analogique 250i (2 350 £), la marque canadienne MOON by Simaudio propose un parfait exemple de cette stratégie. Je sais déjà, alors que l'ampli est encore dans sa boîte, qu'il va être beau et plaisant à utiliser, qu'il fonctionnera admirablement et qu'il sonnera très bien. Il est impossible que Simaudio, qui a récemment lancé le lecteur/préamplificateur 891 à £25k dans le cadre de sa nouvelle collection haut de gamme MOON North, puisse permettre à ce produit d'être autre chose qu'une réussite éclatante. Alors oui, faites votre choix en toute confiance. Heureusement pour nous, le secteur des amplificateurs intégrés de 2 à 3 000 livres sterling est inondé d'excellents amplificateurs : des modèles Naim, Rega, Electrocompaniet, Hegel et Primare, pour n'en citer que quelques-uns, et pour vous donner une idée de la position du MOON sur ce marché, je suggérerais un hybride entre le H120 de Hegel et l'ECI 80D d'Electrocompaniet.

Mais commençons par un tour d'horizon des nouveautés apportées par cette édition V2. Les intégrés sont un pilier de longue date pour MOON, reflétant le look intelligent, quoique légèrement emphatique, de tous les amplis proposés par la marque. Initialement appelé Neo 250i en 2014, et disponible en noir, argent et argent/noir, il est ensuite devenu le 250i Black Edition (les autres finitions ont été abandonnées pour maintenir le prix compétitif), et a finalement adopté des condensateurs Nichicon de meilleure qualité et les mêmes transistors de sortie bipolaires que l'intégré 600i et les modèles monoblocs 888, beaucoup plus coûteux, en 2021. Autre évolution : le potard de volume Alps amélioré.

Pour cette V2, le concept a été poussé un peu plus loin, avec un circuit modifié incorporant des semi-conducteurs de nouvelle génération, un blindage amélioré de l'alimentation et, surtout, l'introduction d'un étage phono MM. Oh, et en plus du noir pur, le combo bicolore noir/argent est de retour. Le format du 250i V2 est conforme à l'aspect élégant de tous les amplis MOON, la qualité de fabrication est rassurante et robuste, et la télécommande est une leçon pour la concurrence quant à la parfaite conciliation du style et de la fonction.

Autrement, les spécifications sont les mêmes qu'auparavant : 50W par canal en classe A/B sous 8 ohms (biaisé en classe A pure pour les premiers 5W) et 100W sous 4 ohms. Le rapport signal/bruit est de 101dB à pleine puissance.

Sur la façade, le bouton de volume est accompagné d'une prise casque de 6,35 mm et, plus rare de nos jours, d'une entrée analogique de 3,5 mm. Cette dernière est associée à quatre autres entrées RCA sur un panneau arrière bien agencé, ainsi qu'à une sortie pré-amplifiée et à l'étage phono MM nouvellement introduit. Enfin, il y a des entrées RS232 et IR, et des ports d'entrée/sortie pour le SimLink de Simaudio, qui peut accueillir d'autres composants MOON - le câble est fourni.

Qualité du son

Est-il répréhensible de se situer à mi-chemin entre l’accessible et le haut de gamme? À en croire certains audiophiles, il s'agirait d'un crime pire que de placer des enceintes de bibliothèque sur une étagère. Où est le piquant, l'ambition, la signature sonore distinctive, le gène du "get-down-and-boogie"? C'est vrai. La hifi avec une attitude est ce que certaines personnes recherchent, et il y en a suffisamment pour satisfaire la demande. Mais n'allez pas croire pour autant que cet amplificateur, en se voulant accessible, cherche à jouer la carte de la sécurité, qu'il a peur de son ombre et qu'il est donc décevant, timide et ennuyeux.

Au contraire, trouver le juste milieu où équilibre, couleur et texture de n'importe quel genre, de 1812 à 1975, sonnent « juste » est une tâche très délicate et, au crédit considérable de MOON, le 250i V2 se rapproche subtilement de cet idéal sous-estimé, aussi bien, si ce n’est mieux, que l'un ou l'autre de ses rivaux Hegel et Electrocompaniet que j'ai mis en comparaison avec lui. Il est vrai que, pour des raisons différentes, les deux modèles scandinaves semblent plus impressionnants de prime abord, mais si l'on prend le temps, le sens des proportions, la cohérence et l'équilibre inébranlable du MOON se révèlent infailliblement convaincants.

Il en va de même pour la présentation, qui est fluide sans étouffer les détails les plus fins. Prenez le ré-enregistrement de Both Sides Now par Joni Mitchell en 2000. Oui, il y a de la chaleur et des cordes soyeuses dans ce titre, mais toute tendance à vouloir trop manipuler l'arrangement luxuriant compromettrait le morceau. Le MOON joue cette chanson à la perfection, la faisant flotter délicatement sur la profonde et lourde houle orchestrale et mettant en valeur la voix crépusculaire de Joni avec une exquise emphase dans le mixage densément stratifié. La profondeur de la scène sonore est remarquable. La prise de Hegel est plus médiane et "dans la pièce", celle de l'Electrocompaniet est ostensiblement plus large et plus légère d’un point de vue tonal, mais aucune n'est tout à fait aussi tridimensionnelle ou somptueuse.

Les synthés cristallins et le rythme souple de l'hymne Somebody Else de The 1975, tiré de l'album I Like It When You Sleep..., sont traités tout aussi adroitement, sonnant de manière non forcée et non colorée, avec une absence très adulte de grain ou de textures grossières.

Le Hegel et l'Electrocompaniet sont tous deux un peu plus percutants et, pour moi, l'emportent sur le plan de l'intensité et de l'élan, mais l'approche plus riche et légèrement plus souple du MOON crée une ambiance dans laquelle il est beaucoup plus facile de s'immerger. C'est un schéma qui se répète au fur et à mesure des sessions d'écoute, la clarté, la vitesse et le contrôle des basses du Hegel faisant parfois paraître le MOON un tantinet décontracté, opaque et arrondi, la chaleur et l'ouverture de l'Electrocompaniet, semblables à celles des tubes, l'emportant parfois sur les atouts estimables de la 250i V2 dans ces domaines. Mais le 250i V2 est-il prudent et morne? Certainement pas.